Mourad Aliev : « Ma vie a commencé quand je suis arrivé en France »

Denis Boulanger/PresseSports

Né en Russie, Mourad Aliev, 26 ans le 31 juillet, a connu un destin hors norme avant d’obtenir sa qualification pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020. Ce fils de boxeur de 2,01 m et 105 kg nous résume ici son parcours et livre ses ambitions dans la catégorie reine des super-lourds (+de 91 kg) où il tentera de succéder à Tony Yoka, le vainqueur de Rio…

 

Que représentent les Jeux Olympiques pour toi ?

C’est l’échelon supérieur de la boxe olympique, le plus haut niveau dans ma discipline, qui diffère de la boxe professionnelle. Je fais partie des quatre Français sélectionnés pour Tokyo, cinq avec Maïva, et c’est déjà une immense fierté.

Devenir Olympien t’apporte une émotion particulière ?

Je ne vois pas ça sous cet angle. Peut-être que quand j’aurai arrêté et que je serai passé pro, il y aura cet émerveillement mais pour l’instant je reste concentré. J’essaye de ne pas me laisser submerger par l’émotion. Je reste focus. Peut-être que quand j’aurai la médaille autour du cou, je pourrai dire « j’ai fait les Jeux Olympiques » mais pour l’instant je reste concentré et j’essaye d’aller au bout de l’aventure qui a commencé il y a cinq ans.

Peux-tu résumer ton parcours ?

Je suis né en Russie et on est venu en France alors que j’avais 5-6 ans. Mon père était boxeur. Du coup, il a dit que je serai boxeur, vu que je suis le premier enfant de la famille. Il m’a transmis sa passion et son amour de la boxe. Mon père m’a entraîné dès le début. Cela fait qu’à la maison, après l’entraînement, on parlait encore de boxe. Parfois, ce n’est pas évident d’avoir un père-entraîneur mais bon, voilà : je suis qualifié pour les Jeux de Tokyo !...

 

Je suis un fils d’immigré et je ne peux que réussir dans la vie

 

 

Il est écrit que tes parents étaient des réfugiés politiques, est-ce exact ?

Non, pas du tout. La vraie raison est qu’ils voulaient trouver une vie meilleure comme tous les étrangers qui viennent en France. Parce que là-bas, en Russie, ce n’est pas la même vie. Mes parents ont fait la demande mais elle ne leur pas été accordée. Il manquait des éléments mais ils ont finalement obtenu un asile normal pour regroupement familial. 

Comment êtes-vous venu en France ?

On est venus comme tous les étrangers : en camion ! (rires) C’est rare d’arriver en avion comme des touristes. Moi, je ne m’en rappelle pas. C’est assez flou. J’avais 5-6 ans. C’est une période que je préfère oublier. Ma vie, en fait, elle commence après tout ça. Je suis un fils d’immigré et je ne peux que réussir dans la vie.

A quel moment as-tu envisagé le haut niveau ?

Je suis officiellement devenu Français à 22 ans. Je n’ai pas eu une carrière de haut niveau dès 14 ans comme Tony (Yoka). Moi, j’ai découvert le haut niveau à 24 ans. J’ai fait deux ans à l’INSEP et quand le n°1 s’est blessé, j’ai pris sa place et j’ai pu me qualifier pour les championnats d’Europe à Minsk, à l’occasion des Jeux européens, où j’ai fini 2e. Chacun a sa destinée. Le soleil ne brille pas pour tout le monde au même moment. Mon destin a fait que j’étais là au bon moment. Et là, je suis à Tokyo alors que ça ne fait que quatre ans que je suis Français.

Tu es donc devenu Français en 2017. Est-ce que ça a été difficile d’obtenir la nationalité ?

Oui, il a fallu beaucoup de démarches. J’ai fait énormément d’allers-retours. Il y avait toujours des papiers qui manquaient. Il a fallu que je prouve la réalité de ma démarche. Il a fallu que je retourne à l’école pour avoir le statut d’étudiant. Parce qu’on ne peut pas demander la nationalité si on n’est pas étudiant. Heureusement, l’ancien DTN de la boxe Monsieur Kévinn Rabaud m’a beaucoup aidé. Il a fait une lettre pour appuyer ma demande en disant que l’équipe de France avait besoin de moi. Et aussi une élue de ma ville (2) qui s’occupe des discriminations faites aux personnes étrangères ainsi que le maire m’ont aidé à effectuer toutes ces démarches. Ce sont des personnes que je remercie énormément.  

Et ton père est toujours aussi impliqué dans ta carrière ?

Je sais qu’il est très heureux au fond de lui mais il essaye de ne pas trop le montrer. Il ne veut pas trop s’enflammer. Il sait que rien n’est fait. A Tokyo, il faut aller chercher la médaille.

 

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Denis Boulanger/PresseSports

 

Et tu envisages une carrière pro, après ?

Oui. Ma vie ne s’arrête pas aux Jeux. J’essaie de voir plus loin.  La boxe olympique, c’est trois rounds, ce n’est pas assez. Ça va vite. Ce n’est pas la boxe que je ferai toute ma vie.

Et Paris 2024, ce n’est pas un objectif ?

Je verrai en fonction des résultats. Il y en a qui préfèrent rester dans la boxe amateur mais ce n’est pas mon cas. J’ai vraiment envie de passer professionnel.

Comment pourrais-tu comparer la boxe amateur et la boxe professionnelle ?

En fait, c’est comme deux livres qui racontent la même histoire mais de différente manière. Ce que j’aime dans la boxe professionnelle, c’est le côté « show ». On peut vraiment montrer sa boxe. On a douze rounds. Tu peux vraiment montrer ce que tu vaux, ce que tu as dans le ventre. Il y a plus de KO. Les gants, ce ne sont pas les mêmes. C’est plus dangereux. En professionnel, ce sont des bandages durs avec des gants où tu n’arrives même pas à mettre ta main dedans. Tu prends un coup, tu es sonné. Tu es à visage découvert. C’est un show qui attire les spectateurs et c’est ça que j’aime.

 

 

Quand il y a eu le confinement je me suis entraîné dans ma chambre comme je le fais depuis que je suis tout petit

 

 

Votre sport a été très impacté par le Covid avec l’interdiction des contacts et du sport en salle…

Comme tous les sports de contact et de salle, on a été arrêtés pendant un long moment mais après, en tant que sportifs de haut niveau, on a pu avoir une dérogation. Pour moi, rien n’a changé en fait. Quand il y a eu le confinement je me suis entraîné dans ma chambre comme je le fais depuis que je suis tout petit. Mon père, il m’entraînait dans ma chambre comme il l’a toujours fait. En fait, c’était un retour aux sources.

Et l’entraînement dans la chambre, cela consiste en quoi ?

C’est du shadow boxing, du crossfit, de la leçon. Mon père, il m’a toujours entraîné un peu partout, dans les chambres, dans les stades, dans les parcs, un peu partout. C’était du déjà vu. J’ai travaillé avec mon père, ça m’a fait du bien. J’ai fait de la muscu, de la boxe. Tout ce qu’il fallait. Quand je suis revenu en équipe de France, j’étais en forme. J’ai même pris un peu de muscle.

Concernant ton père, dirais-tu que c’est quelqu’un de dur, d’exigeant ?

Non, c’est quelqu’un de très gentil. Mon père, il s’est sacrifié pour moi. Je le voyais, il venait m’entraîner alors qu’il était fatigué. On s’entraînait deux fois par jour. Il me disait : « tu vas y arriver, tu vas aller au Jeux Olympiques. » J’ai des vidéos de moi à 7-8 ans où mon père me dit : « tu vas être champion du monde. »  Si j’avais été seul, j’aurais lâché. Et aujourd’hui, je vais représenter la France aux Jeux Olympiques. Pour moi, c’était naturel, je ne me rendais pas compte que je m’entraînais. C’est comme le fils d’un pâtissier qui passe toutes ses journées dans la pâtisserie et qui apprend à faire des gâteaux. Je n’en serai pas là aujourd’hui sans mon père.

 

  1. Ronchin, dans le Nord, une ville située dans la Métropole lilloise.

 

 

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